La famille médecine – psychanalyse

pour une meilleure  compréhension

de la "mal-a-die"

 

Avec le Docteur Laurence Pescay

 

 

Si la psychanalyse travaille sur la psyché, la médecine, elle, prend

en charge le corps, le soma, le Moi ; celle-ci  se veut à la fois curative

et/ou symptomatique lorsque le malade et son contexte de souffrance

ne peuvent être vaincus.

 

 

Il n’existerait pas de maladies psychosomatiques et d’autres qui ne le seraient pas. Il y a des êtres humains malades avec un héritage transgénérationnel.

Les deux approches, psychanalytique et médicale, vont permettre une prise en charge du patient, tant sur le plan organique que mental. Lorsque l’inconscient souffre, le corps suit. Et si les viscères et autres organes profonds font entendre leurs plaintes, l’appareil locomoteur n’est pas en reste. Le souci ronge, la souffrance psychologique, image d’un mal sournois, provoque lentement, mais sûrement, d’irréversibles altérations, brèches du corps et de l’esprit, par où peuvent s’engouffrer des maladies graves comme, par exemple, le cancer.

En effet, un déséquilibre psychologique, avec son contingent de forces d’autodestruction, de pulsions de mort, peut générer ou favoriser l’apparition d’un cancer. Ainsi est reconnue l’importance d’un deuil non élaboré, c’est-à-dire une blessure non cicatrisée, un vide qui reste après la perte de quelqu’un (ou de quelque chose) dans la vie d’un individu, comme facteur déclenchant ou événement révélateur d’un cancer. Sa localisation ne sera pas le fruit du hasard. De même, les cancers du sang renvoient-ils au “sans”, sur le plan psychanalytique, au manque, à l’angoisse de castration. L’étude analytique du patient, le travail sur son arbre généalogique, permettront d’en comprendre le sens, comme peut déjà l’indiquer l’expression populaire “se faire du mauvais sang”…

La médecine, de plus en plus performante dans ses traitements chirurgicaux, chimiothérapiques, radiothérapiques, hormonothérapiques, a, depuis plusieurs années déjà, mis en place un soutien psychologique pour le malade et sa famille. Dans cette prise en charge, souvent de longue durée, la psychanalyse pourrait s’inscrire et permettre au malade, en travaillant sur les trois instances, “Ça, Surmoi, Moi”, décrites par Freud, d’annuler ce cheminement destructeur ; cela permettrait ainsi, en collaboration avec l’équipe médicale, une augmentation de l’effet curatif et du pourcentage de guérison. Mais il peut s’agir également d’un accompagnement du malade dans sa souffrance, sa douleur et l’acceptation de la mort.

Les maladies rhumatismales pures et les maladies générales, qui comportent des douleurs de l’appareil locomoteur, sont multiples. Dans ces grandes maladies rhumatologiques, arthrites inflammatoires, arthrose, hernies discales, l’intervention de la psyché est différente d’un cas à l’autre et les douleurs, l’importance, la chronicité des troubles sont facteurs d’angoisse, de dépression et, finalement, d’aggravation des troubles fonctionnels.

La maladie de Crohn est une bonne illustration de la nécessaire complémentarité  psychanalyse et médecine pour une reconstruction possible.  Il s’agit d’une maladie inflammatoire chronique, affection sérieuse et parfois invalidante, qui touche le côlon, l’intestin grêle, le rectum. Elle évolue par poussées avec d’importantes diarrhées, douleurs abdominales et altération de l’état général. Dans cette maladie, les traitements médicaux ne sont pas à visée étiologique mais symptomatique. La position psychologique du patient est déterminante et conditionne tout particulièrement l’évolution de sa maladie. La psychanalyse prend, là, toute sa place.

Dans le domaine de la génétique, la médecine a réalisé d’importants progrès ; la médiatisation, avec notamment les journées sur la myopathie, permet de mieux visualiser les avancées réalisées dans ce domaine. Pourtant, à l’échelon familial et individuel, la survenue d’un enfant handicapé sur le plan psychomoteur, reste toujours autant synonyme de souffrance, de douleur. Pourquoi telle famille et non telle autre sera-t-elle touchée par ce problème ? Enfant réparateur du couple ? Héritage transgénérationnel ? La compréhension du sens, sur le plan psychanalytique, sera une aide précieuse dans l’acceptation de cette situation pour l’enfant, sa famille et l’évolution de tous.

Depuis longtemps, la prise en charge de cardiaques s’inscrit dans des thérapies comportementales anti-stress : à un meilleur équilibre psychologique, s’ajoute un meilleur équilibre tensionnel, donc une bonne évolution du profil cardiaque.

Un diabétique, insulino-dépendant, verra ses doses d’insuline diminuer, tout comme son cortège de complications habituelles, “s’il est mieux dans sa tête”, dans son corps, dans sa vie.

N’oublions pas les grandes maladies du sang des années 2000 : sida et hépatites. A thérapeutique identique, la différence d’évolution à l’autre reste surprenante. Certains se verront porteurs d’une hépatite B ou C non agressive pour leur corps ; d’autres, au contraire, auront en eux un virus destructeur avec risque d’évolution vers la cirrhose ou le cancer. De même pour le sida, le temps d’évolution, entre le stade porteur sain du virus et maladie déclarée, reste une latence spécifique à l’individu avec une réponse à la bi ou trithérapie, très variable également.

Sur ce sujet, la médecine, à l’heure actuelle, ne peut que constater et enregistrer les données. En partenariat, la psychanalyse, qui permet à l’individu d’accéder à une meilleure connaissance de lui-même, a un rôle important pour déjouer la maladie.

Dans le domaine des affections psychiatriques, psychiatres et psychanalystes devraient être interactifs. La psychanalyse prendra toute sa place dans l’étude des névroses, phobie, agoraphobie, claustrophobie…

Alors médecine et psychanalyse une grande famille ? Oui, elles devraient l’être, la psychanalyse sur le plan préventif, la médecine sur le plan curatif ou, du moins, devraient-elles mettre tout en œuvre pour le réaliser. Toutes deux s’intéressent à l’individu : un patient à prendre en charge dans sa souffrance, dans sa globalité, tant sur le plan somatique que psychologique. L’association de ces deux forces vives ne peut être que dynamisante et évolutive pour le monde de demain.